Lundi 12 avril 2010, par Catherine Sokolowski

« ça me manquera que tu me manques »

Septembre 2000. Quinze ans qu’ils forment un couple. Ils ont décidé d’arrêter, ils vont divorcer. Emilie boit, Antoine est amoureux d’une femme plus jeune. Une situation plutôt classique, un couple qui s’essouffle après tant d’années de vie commune, en se demandant si « rester toute une vie avec la même personne s’apparente à un manque d’imagination ». Dans une mise en scène de Jean-Luc Duray, Jacqueline Préseau et Oscar Dubru nous font partager huit années d’après divorce, heurs et malheurs de deux personnes qui ont, l’une pour l’autre, une affection très profonde. Beaucoup de crédibilité.

Pas de décor, juste quelques caissons noirs disposés ça et là, obstacles ou espaces de quiétude. Pas de changement de costume, Emilie est en blanc et Antoine est vêtu de noir. Juste un tableau d’écolier sur lequel se succèdent les mois et les années, quatorze scènes qui sont autant de moments de vie. Chez le psy, devant un cercueil, chez Emilie ou à l’hôpital, le couple passe en revue le passé et le présent, sans vraiment les scinder.

C’est toujours vers Emilie, qu’Antoine, écrivain, a envie de se tourner. Même quand il est avec une autre femme, c’est à Emilie qu’il voudrait le raconter. Quand il revient lui faire des avances quelques années après leur rupture, est-ce par dépit ou par amour ? Emilie, forte et faible à la fois, demande pardon à Antoine pour son alcoolisme passé, voudrait qu’on la prenne dans les bras et finit par se marier avec un homme rassurant.

Avec justesse, Jacqueline Préseau et Oscar Dubru s’inventent une relation teintée de nostalgie et de bienveillance. Humour, malice et désarroi se côtoient dans cette pièce qui ne sombre jamais dans le désespoir. Au contraire, malgré la gravité du sujet, il y a de la légèreté et de la bonne humeur dans les dialogues, qui semblent signifier qu’il faut se quitter pour mieux se trouver.

Cette pièce de Bernard Slade est jouée régulièrement, à Paris ou au Théâtre Royal du Parc l’année dernière, dans d’autres mises en scène et avec d’autres acteurs. Si vous l’avez déjà vue, ce sera l’occasion de comparer, dans le cas contraire, elle vous fera passer un bon moment et peut-être réfléchir à l’authenticité de certaines relations.