Mercredi 17 décembre 2008

Voyage au centre de l’hiver

Avec V.-Nightmares, Prix de la Critique 2007 pour le meilleur spectacle de danse, le chorégraphe Thierry Smits nous livre une oeuvre puissante et monumentale. « Ice », le quatrième et dernier de ces « cauchemars », consacré à l’hiver, bouscule le spectateur par l’intensité des images qui lui sont données à voir.

Chacun des quatre cauchemars de ce projet est associé à une des Quatre Saisons de Vivaldi (le « V. » de « V.-Nightmares ») : telles quatre variations d’un même rêve, chacune explore les métamorphoses, les sensations, les relations qu’évoque la saison correspondante. Dans l’opus présenté ici, on découvre un espace minéral, stérile, presque chimique. Les corps sont là, les mouvements aussi, mais le vivant s’est transformé, désincarné : restent la glace, le blanc, le froid. Ces extrêmes gagnent petit à petit en intensité par la présence de leur opposé : la vie et l’absence de vie, la glace et le feu, le blanc et le noir. Des images très fortes jouant sur ces oppositions s’offrent alors au spectateur, qui voit les éléments se transformer sous ses yeux.

Colonne vertébrale de cette performance, les quatre danseurs (trois hommes et une femme) livrent une prestation d’une précision admirable. Ils sont véritablement habités et utilisent toutes les ressources de leur corps pour transporter le public à travers un spectre très large d’émotions et de sensations. Ce sont eux qui, en manipulant des objets et des accessoires, font se métamorphoser l’espace et l’ambiance. Cela donne une impression intéressante d’univers en autarcie, au prix de moments de régie de plateau parfois un peu longs. La nudité, un thème cher à Thierry Smits, est intelligemment mise au service du spectacle. La musique enfin, qui mixe les violons baroques de Vivaldi avec des passages électro, réussit à envelopper le spectateur dans cet univers onirique.

Un cauchemar donc, car il nous fait frissonner, mais un rêve avant tout car il nous emporte loin dans notre imaginaire.