Quatre pièces indépendantes composent le projet, associées aux Quatre Saisons de Vivaldi (le « V. » de « V.-Nightmares ») : telles les variations d’un même rêve, chacune explore les métamorphoses, les sensations, les relations qu’évoque la saison correspondante. Ainsi, le printemps (« Fluid Mechanics ») aborde la jeunesse et la fluidité des corps, tout est légèreté et volupté. Durant l’été (« Tan »), la douce chaleur du printemps devient brûlante, violente, le rose vire au rouge, les corps sont exposés, brutalement, directement. Souffrance et jouissance connaissent leurs extrêmes. L’automne (« Moss & Mould ») voit le rouge de l’été brunir, s’épaissir. La mort, que l’on pressentait dans la violence de l’été, fait son entrée, dans toute sa lenteur, et décompose la matière organique. L’hiver enfin (« Ice ») semble se situer dans un espace minéral, stérile, chimique. Le vivant n’est plus, restent la glace, le blanc, le froid. On comprend dès lors que l’on puisse appeler ce rêve « cauchemar ».
Colonne vertébrale de cette performance, les quatre danseurs (trois hommes et une femme) livrent une prestation d’une précision admirable. Ils sont véritablement habités et parviennent, trois heures durant et avec toutes les ressources de leur corps, à transporter le public à travers un spectre très large d’émotions et de sensations. Ce sont eux qui, en manipulant des objets et des accessoires, en déclamant des textes, ou en se faisant vidéastes amateurs, font se métamorphoser l’espace et l’ambiance. Cela donne une impression intéressante d’univers en autarcie, au prix de moments de régie de plateau parfois un peu longs. La nudité, un thème cher à Thierry Smits, est omniprésente et est intelligemment mise au service du spectacle. La musique enfin, qui mixe les violons baroques de Vivaldi avec des passages électro, réussit à envelopper le spectateur dans cet univers onirique.
On sort de ce spectacle comme l’on s’éveille d’une nuit où notre inconscient s’est déchainé… Impressionnant !
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