Sur scène, le décor est réaliste : côté jardin, un bureau de policier, avec armoire et photos de suspects au mur, et côté cour, un salon bourgeois. Pour les séparer, une tapis rouge fait office de travée centrale, et s’achève en avant-centre sur un banc de bois qui sera utilisé pour les passages en distanciation.
La mise en scène, à l’instar de la scénographie, travaille sur la simplicité. Les comédiens sont bien placés, en lumière, sont audibles et justes. Et si elle ne porte pas de point de vue particulier qui enrichisse le texte, elle veille à sa compréhension.
C’est là que se forme la grande question du spectacle : la dramaturgie nécessite-t-elle cette précaution ? Le texte, en effet, ne présente aucune difficulté majeure, et paraît même à certains moments un peu discursif voir explicatif. D’une part, le rythme semble parfois coupé par les mises au noir longues et non essentielles, même si les deux lieux du texte et les nombreuses ellipses participent également à cette arythmie. D’autre part, le manque de sous-texte rend les personnages un peu trop honnête pour se mettre mutuellement en difficulté. Il s’ensuit une absence de suspens qui ne facilite sans doute pas la tâche aux comédiens.
Le travail de ces derniers en revanche est à souligner : le jeu de Gérard Giantivi donne une belle malice au policier, et lui apporte un naturel auquel on s’identifie aisément. Face à lui, Jacqueline Préseau transforme la magistrate en véritable bourgeoise de vaudeville, avec un jeu tout en éclats. Cela donne du relief et du caractère à son personnage.
Au croisement de ces deux réalités, le décalage avec la gravité des questions abordées (qui juge la justice ?) fait naître l’humour. Le spectacle est salué par les rires francs des spectateurs qui ont permis, ce soir-là, de jouer à guichet fermé ou peu s’en faut.