Cette pièce fait un portrait noir de la très célèbre Sainte-Evita Perón, au moment où, rongée par le cancer, elle vit ses derniers jours. Elle est entourée de ses proches qui vivent sa mort prochaine comme un banal fait divers.
L’intrigue aurait pu être intéressante : « Cancer réel ou coup d’état ? » si, du moins, elle avait été, un tant soit peu, palpable ! A moins d’avoir lu au préalable le résumé de la pièce, le spectateur n’imagine à aucun moment être le témoin d’une énigme policière mais simplement celui d’une scène de vie familiale. Mais, à vrai dire, il ne recherche même pas une histoire, tellement il est frappé de plein fouet par la sur-agitation sur le plateau et l’excentricité des personnages. Ceux-ci, tous incarnés par des hommes, sont travestis en tenues souvent légères pour les dames et complètement délurées.
Oui, Eva Perón est un véritable bordel !
Tout le monde court dans tous les sens sans raison apparente, pousse des cris stridents, s’insulte, se frappe, se gifle, se bouscule, se trahit. Tantôt Eva parle en français avec un accent espagnol pas toujours au point, tantôt elle parle en espagnol et devient alors subitement incompréhensible pour une partie du public, tantôt elle maîtrise son accent. Les dialogues n’ont ni queue ni tête : on passe du coq à l’âne, de la tendresse à la violence, de l’agonie à la joie de vivre !
Bref, autant de paramètres qui font que le spectateur se sent complètement perdu : « Qui est qui ? Qui fait quoi ? ». Il ne comprend pas. Il ne sait pas où il est et où on l’emmène !
Ce manque de cohérence total laisse perplexe et amène un questionnement en plein spectacle : Pourquoi ce choix de mise en scène ? Pourquoi ce type de costumes, des chansons chantées avec l’original en arrière-fond, ce dénouement ? Le spectateur est confus, il a donc du mal à y croire !
Dans ce genre de situation, deux choix s’offrent alors à lui : soit, il décroche complètement, se condamnant à regarder sa montre toutes les dix minutes et à bailler entre les coups ; soit, il décide, dans sa quête effrénée de sens, de lâcher-prise et de se laisser emporter par cette satire déjantée ! Dans le cas où il opte pour la seconde option, le spectateur se surprendrait bien à sourire de plus en plus et même, à la surprise générale, à ressentir une once de sympathie pour ces personnages aussi hystériques qu’odieux !
En conclusion, pour passer un bon moment, il ne faut pas venir voir cette pièce avec d’immenses attentes : on n’en ressort pas plus informé sur Evita Perón ou l’Argentine, on ne retire aucune leçon de vie, on ne tressaillit pas de suspense ! Par contre, si on ferme les yeux sur le chaos infernal tout en se laissant aller à la folie ambiante, on en ressort, certes interloqué, mais aussi le sourire aux lèvres !