Un moment avec Éric

Ixelles | Théâtre | Le Rideau

Dates
Du 9 au 18 décembre 2015
Horaires
Tableau des horaires
Rideau de Bruxelles
rue Goffart, 7 A 1050 Ixelles
Contact
http://www.rideaudebruxelles.be
contact@rideaudebruxelles.be
+32 2 737 16 00

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Un moment avec Éric

"Chétif, gringalet, je ne pouvais m’imposer dans les bagarres,
j’ai donc écrit dès que j’ai pu". Éric Durnez

Éric Durnez était un poète et un grand dramaturge belge.
Il naît à Bruxelles en 1959. Il étudie la mise en scène à l’INSAS.
En 1999, il quitte la Belgique pour le Gers et le petit village de Gaudonville. Solitaire, il compte bien des amis de par le monde. Il conserve des liens étroits avec la Belgique et en développe d’autres, en particulier avec l’Afrique où il donne régulièrement des ateliers d’écriture.
Une complicité l’unit à Thierry Hellin et Thierry Lefèvre. Ensemble, au sein d’Une compagnie, ils créent une multitude de textes : Brousailles, Échange clarinette, La maman du Prince, Le voyage intraordinaire, Le Dernier ami,... Autant de spectacles marquants, récompensés aux Rencontres théâtre jeune public de Huy ou aux Prix de la Critique.
Le Rideau est un peu sa maison : La Douce-amère, Sokott, Un paradis sur terre et puis un bel événement : Éric Durnez Aller/Retour.
En 2002, il reçoit à Limoges le Prix de la Dramaturgie francophone de la Commission théâtre de la S.A.C.D. et en 2006, le Prix triennal de Littérature dramatique de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Son ami Émile Lansman a édité une quarantaine de ses textes.

2 spectacles : LE DERNIER AMI et BROUSAILLES (tout public à partir de 10 ans)

Les lectures :
Chaque jour, à 18h30, dans le bar, des artistes lisent un texte d’Éric Durnez. À découvrir :
L’homme-hippopotame
D
Bamako
Le calme
Le fils de la vodka-menthe
Childéric
Ma vieille mélancolie
Franz, Christine et les autres
Contes à réchauffer

Avec Valérie Bauchau, Rachid Benbouchta, Lucile Choquet, Pascal Crochet, Didier De Neck, Joseph Drouet, Laura Durnez, Frédéric Dussenne, Gaëlle Gillis, Thierry Hellin, Saïd Jaafari, Cécilia Kankonda, Yasmine Laassal, Nicolas Laine, Isabelle Legros, Aline Mahaux, Juan Martinez, Jérôme Nayer, Vincent Rouche, Sophie Vanhulst, Delphine Veggiotti.

LE CABARET :
Un cabaret composé de textes de chansons d’Éric Durnez, proposés à des artistes.
Pour qu’ils s’en emparent.
Pour continuer, faire souffler un autre vent.

Avec : Stephan Barbery, Aude Dierkens, Laura Durnez, Gauthier Flémal, Simon Gautiez, Renaud Grémillon, Thierry Hellin, Marc Jonckers, Drita Kotaji, Yasmine Laassal, Isabelle Legros, Fabienne Mainguet, Juan Martinez, Ivan Tirtiaux, Laura van Maaren, Tatiana Vanhelmont, Yvan Vanhelmont, Delphine Veggiotti, Pascale Vyvère, Les Tibidi (Muriel Legrand, Julie Leyder, Ariane Rousseau), Guys in the Kitchen (Nathalie Boulanger, Caroline Cereghetti, Fabienne Coppens, Sylviane Evrard).

LA RENCONTRE :
Un moment privilégié pour explorer l’œuvre d’Éric Durnez.
Avec Monique Blin, cofondatrice des Francophonies en Limousin et des associations “Écritures vagabondes » et « Écritures en partage », Renaud Grémillon, Thierry Hellin, Émile Lansman, Thierry Lefèvre, Giuseppe Lonobile et, sous réserve, Axel Cornil et Thomas Depryck.
Animée par Michael Delaunoy et Vincent Romain.

Avec le soutien du Centre des Écritures Dramatiques Wallonie-Bruxelles.

Un moment avec Eric version liégeoise aura lieu du 7 au 11 mars 2016 au Théâtre de Liège en collaboration avec le Centre culturel Les Chiroux (Liège).

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Mardi 15 décembre 2015, par Palmina Di Meo

« Un moment avec Eric », une histoire d’amitié, une ode à la vie.

« Un moment avec Eric », c’est un hommage rendu à une amitié qui a duré 20 ans entre Eric Durnez, dramaturge, poète et chansonnier et les deux Thierry (Thierry Hellin et Thierry Lefèvre) jusqu’à la mort d’Eric l’année dernière. L’histoire commence par une rencontre au Conservatoire et la création d’ « Une compagnie ». Maison d’accueil de nombreux spectacles depuis « La douce-amère » jusqu’à la rétrospective « Eric Durnez Aller/Retour » du vivant de l’auteur en 2011, Le Rideau est aujourd’hui encore le complice de moments exclusifs, intenses en émotions que proposent Thierry Hellin et Thierry Lefèvre jusqu’au 18 décembre. Des lectures, des rencontres et la découverte du « Dernier ami », créé au festival de Huy en 2014, une odyssée qui se teinte d’une résonance toute personnelle dans la bouche de Thierry Lefèvre.

Comment est née l’idée de ce « Moment avec Eric » ?

Thierry Hellin : Depuis le décès d’Eric en 2014, Thierry Lefèvre et moi avions le désir d’organiser un moment autour de lui. Pas quelque chose de solennel, mais plutôt un moment festif, théâtral. Il y a eu d’autres hommages importants que nous avions axés sur la musique. Mais nous avons voulu un cabaret où les partitions seraient distribuées à des artistes qui ne connaissaient pas Eric, en leur laissant la liberté de créer d’autres mélodies dans un esprit d’ouverture et de fête. Parce qu’Eric adorait manger, boire et faire la fête. Et pour les lectures aussi. Nous avions 7 jours et 8 textes à choisir. On a proposé aux lecteurs de faire un choix parmi les 40 textes qu’Eric a écrit.

Thierry Lefèvre : Pour le cabaret, on a donné carte blanche aux artistes. On a découvert le résultat le matin même.

Comment se passait le travail, la collaboration avec Eric Durnez ?

Thierry Hellin : Eric a travaillé quasi exclusivement pour nous. Il était celui qui mettait les mots sur les idées. On partait d’une thématique, Eric écrivait, revenait avec une proposition à laquelle il était rare que l’on apporte des changements. C’était souvent un premier jet. Nous en discutions. Il améliorait avec quelques retouches. Eric pouvait travailler ses textes sans discontinuer sans pour autant pratiquer l’écriture de plateau. Lorsque sa proposition était définitive, il nous remettait sa version finale et nous en faisions ce que nous voulions.

Thierry Lefèvre : Il disait qu’il était mort…

Quelle sera la suite pour « Une compagnie » ? Allez-vous écrire vous-mêmes, faire appel à des auteurs ?

Thierry Hellin : On se retrouve orphelins… Avec Eric, c’était avant tout une amitié. C’était une histoire de gens, de compagnonnage, d’amis. Eric sera toujours là. Quand il est mort, on avait trois projets en chantier. Pour l’un, nous avons 3-4 pages, pour un autre presque rien, pour un troisième 12 pages. On a une envie d’écrire aussi…. peut-être justement à partir de cela : Que faire quand on n’a pas de mots ?

Thierry Lefèvre : Il nous a quittés… On essaye de dresser le bilan. C’est la question : comment passer par une écriture qui serait la nôtre. Il y a une envie d’écrire sur ce que l’on ressent quand on est dans le tunnel, sur les solitudes.

Thierry Hellin : Et puis envie de se trouver à deux sur le plateau, de se laisser aller et de s’entourer de personnes qui connaissent la compagnie.

Qu’est-ce qui vous touche dans les textes d’Eric ?

Thierry Hellin : Quelqu’un l’a relevé au cours de la rencontre tout à l’heure : Eric était un écrivain du silence. Le non-dit se sent si fort dans ce qui passe sous le silence. Il était dans la narration, sans être descriptif. Il était dans la poésie avec des propos parfois « terre à terre ». Il aimait les mots et pouvait jongler avec une somme de styles différents. Il était épique, shakespearien, tragique… Avec lui, on est à la fois dans le conte, dans la nouvelle. Il avait cette bivalence en lui. Chaque chose peut être son contraire. Ce qui est simple est compliqué, ce qui est beau peut être laid. Ses écrits ne sont pas sur l’actualité. Mais il a cette manière de contourner tout, en parlant de choses réelles, concrètes. C’est une écriture théâtrale « jouante », avec une préférence pour des scènes courtes, des scènes à eux. Et puis il y a le plaisir de la comédie. Les textes sont magnifiquement écrits.

Thierry Lefèvre : Il disait : « J’aime les fleurs mais je n’aime pas que l’on sache que j’aime les fleurs... »

Thierry Lefèvre, vous avez été son principal metteur en scène. Comment abordez-vous les textes d’Eric ?

Thierry Lefèvre : Ses textes sont musicaux. Ce qui frappe c’est la musicalité. Je les lis et je rêve. Je laisse venir. Puis, je cherche l’espace le plus juste. Je privilégie le minimalisme. Parce que mon goût va vers le dépouillement sur la scène mais surtout, nous voulons donner de l’importance au texte et au comédien qui le dit bien sûr. « Le dernier ami », j’avais envisagé de le présenter avec une simple chaise. Quand je commence le travail, je passe par des improvisations. J’apprends le texte, et puis je le lance dans l’espace. Je prends une chaise ou autre chose… Le corps trouve des solutions, des chemins.

Avez-vous un souvenir spécifique d’un moment passé avec Eric, un moment auquel il vous arrive de penser, une vision ?

Thierry Hellin : Dix jours passés avec lui en France. On écrivait durant la journée. On allait faire des courses. C’était chez lui dans le Gers (une région avec des produits de terroir…). On avait tout à coup un petit creux, on mangeait… Eric savait très bien cuisiner… Eric se mettait au piano… On se rendait régulièrement dans le Gers… Sa maison était une maison de passage… on y retrouvait sa compagne Claire. Il y avait des caravanes dans le jardin. On pouvait y loger à plusieurs…. On chantait. Eric était un érudit en musique, en classique, jazz… Mais ce n’était pas un ange pour autant. Il y a eu des doutes, des absences, des silences à certains moments… C’était quelqu’un qui pouvait être très noir, très pessimiste mais jamais avec cynisme… C’était une belle personne avec beaucoup d’autodérision, une grande lucidité sur la vie. Il aimait la vie même s’il s’en cachait. Il n’avait absolument pas envie de partir…

Thierry Lefèvre : Pour moi, ce sont des promenades dans le Gers et des conversations où l’on parlait de la vie. Il me reste la saveur de l’émotion partagée à travers le théâtre. Pour « Le dernier ami », j’ai tout à coup la vision d’une salle de fête, froide, avec de chaises en plastique, bleues… Il avait écrit une première version. On a beaucoup pleuré. Il m’a demandé de m’absenter et m’a présenté une nouvelle version. Pour ce texte, « Le dernier ami », il s’est emparé de ma rencontre avec Max Gély. Il y a un ancrage dans le réel… Mon ami est mort aussi et c’est le début du ‘Dernier ami » « Quand mon dernier ami est mort, j’ai quitté le village…

Thierry Hellin : Il a laissé un mot dans une cache que sa fille a retrouvé et qui dit : « Je m’en aperçois un peu tard, c’est d’une grande banalité, mais la vie est belle... »

Propos recueillis par Palmina Di Meo
Crédits photos ALICE PIEMME / AML.

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