L’installation scénique donne déjà à elle seule le ton bricolé de la pièce : un meuble surchargé de bibelots pour la plupart à connotation pieuse et éclairé des petites ampoules à la fausse lueur divine, des tringles croulant sous les vêtements, des sacs bedonnants posés à même le sol, une table et une chaise en bois contreplaqué usé. Car Marie a une vie qui ressemble justement à un assemblage incertain de petites et grandes misères. Elle se lamente et vitupère inlassablement sur le père de son Jésus de fils qui ne l’a jamais reconnu, sur sa belle-fille aux influences néfastes, évoque amèrement une administration qui ne la soutient pas, se raccroche au juste savoir de l’ecclésiastique de son quartier, se fait un sang d’encre pour son fils qui aurait versé dans le terrorisme, et court après une justice qui ne l’entend pas.
Jean-Marie Pétiniot raconte tout ce patchwork socio-tragique à force de langage populaire et de répétitions incessantes fixant chaque fois davantage l’empreinte du malheur. De la bouche d’une Marie plus vraie que nature, sort autant de grossièretés haineuses que de poésie de bas étage. Jusqu’au désespoir le plus profond, c’est une course au pires affres de son déséquilibre existentiel. Tellement pathétique dans son désarroi, elle se prend également à se rêver rayonnante au terme d’un régime imaginaire, pour plaire de nouveau au bourreau qui l’a lâchement abandonnée avec un enfant.
Rien que pour cette incarnation stupéfiante et la vive peinture sociale du texte, Stabat Mater se pose en théâtre virulent et passionnel. Belle performance à partager.
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