Sur un plateau épuré, les « Mots d’amour » d’Edith Piaf s’élèvent. Commence alors cet échange entre la jeune fille (Edwige Baily) et la dame âgée (Jacqueline Bir). Par bribes et répétitions – caractéristiques de l’écriture de Duras – elles reconstituent l’histoire de Savannah Bay.
Une histoire qui ne peut pas être écrite « pour ne pas réveiller la douleur », une pièce « ni jouée ni écrite », un amour « qu’on ne peut pas dire », un « instant de théâtre ». Cette insistance sur l’instant, ce rejet de l’écriture et de la trace rejoignent tout deux l’idée d’une histoire non linéaire, qu’on ne peut approcher qu’en la déconstruisant et la reconstruisant sans cesse.
Ainsi, ce n’est pas seulement l’amour que Duras interroge, mais aussi la connaissance et l’oubli de cet amour et de la vérité. Traversé par la question de l’indicible, le texte joue entre ombre et clarté, fil sur lequel les comédiennes évolueront avec talent.
Si le non-initié à l’œuvre de Duras mettra peut-être un peu plus de temps à rentrer dans ce texte déconstruit, il se fera bien vite rattraper par la beauté de la plume de Duras.
L’amateur, lui, appréciera la sensibilité et la justesse de Sireuil quant à l’univers durassien. À noter ce magnifique tableau où les lumières s’intensifient et les vagues déferlent : pur moment de bonheur et d’intensité théâtrale.
Une pièce d’une incroyable poésie à ne pas manquer !
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