Quelques tables et quelques chaises symbolisent une salle d’étude lambda. Un décor dépouillé dans lequel Lilly (Olivia Harkay) découvre son nouvel univers scolaire en compagnie de William (Jérémie Petrus). D’autres étudiants les rejoignent, avec leur caractère, leurs passions et leurs aspirations ; ils semblent s’entendre même s’ils ne se font pas de cadeau. Peu à peu, on découvre les défauts des uns, lâcheté, jalousie, méchanceté s’entremêlent et vont crescendo et les qualités des autres lorsqu’ils s’opposent, timidement, à l’agressivité des premiers. Même les élucubrations n’agitent pas les consciences : quand William prétend « observer les étudiants musulmans pour le gouvernement », Lilly l’accepte sans trop s’émouvoir. Réciproquement, les scarifications de Lilly n’altèrent pas vraiment les pensées de William. Ici l’adulte n’existe pas. Parfois certains font allusion à leurs parents mais ces derniers n’occupent pas la scène, nous sommes dans un monde d’apprentis adultes qui se cherchent, un monde sans pitié. Ici, c’est chacun pour soi. Tant pis pour les problèmes de Lilly, l’isolement de Chadwick ou la déception amoureuse de William. Et même dans la dernière partie, lorsqu’enfin les adultes interviennent, ils déçoivent.
Un spectacle parfois gai comme « un pinson qui atteint l’orgasme » mais qui se transforme inexorablement en drame sanglant. Le monde des ados, bientôt adultes, avec ses jeux vidéos violents en toile de fond, dysfonctionne-il ? Le théâtre s’attarde de plus en plus sur les débâcles d’une jeunesse hésitante avec des pièces comme le très noir « Happy Slapping » de Thierry Janssens ou « le chagrin des ogres » de Fabrice Murgia qui relate la sombre histoire de Bastian Bosse.
Dans cette école anglaise, semblable à toute autre école, une histoire banale bascule dans le drame. Le texte fort de Simon Stephen résonne comme un avertissement : notre jeunesse est fragile, prête à déraper. Ici, on a atteint l’étiage : pour désormais l’éviter ? Du théâtre qui suscite le questionnement. A voir.
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