Métamorphoses

Bruxelles | Théâtre | Théâtre des Martyrs

Dates
Du 10 janvier au 10 février 2018
Horaires
Tableau des horaires
Théâtre des Martyrs
Place des Martyrs, 22 1000 Bruxelles
Contact
http://www.theatre-martyrs.be
billetterie@theatre-martyrs.be
+32 2 223 32 08

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Métamorphoses

« Je me propose de dire les métamorphoses des formes en des corps nouveaux » C’est par ces mots que s’ouvre le long poème d’Ovide, qui conte deux cent trente et une histoires de métamorphoses.
Vaste récit, où se bousculent, dans un agencement improbable, des légendes et les fragments réécrits des grandes voix du passé : Homère, Hésiode, les Tragiques grecs, Lucrèce et Virgile...
On y croise des dieux, des héros et des hommes qui, soumis à l’action de la passion, se transforment. Animaux, arbres, fleurs, pierres, rivières ou souffles : rien ne perdure et tout se transforme...
« Il n’y a rien de stable dans l’univers entier ; tout passe, toutes les formes ne sont faites que pour aller et venir. Ce que nous avons été, ce que nous sommes, nous ne le serons plus demain. »
L’œuvre fut une source d’inspiration majeure durant la Renaissance et l’époque baroque, particulièrement dans la peinture et en musique. Convoquer cette matière sur un plateau de théâtre aujourd’hui suppose de lui faire subir à son tour une métamorphose, une transformation qui lui confère une actualité, une raison d’être qui soit autre que purement muséale. Le projet propose une cohabitation dynamique entre les récits d’Ovide et une pensée contemporaine qui redé nit la notion du vivant. Sujet, dont s’emparent la philosophie, l’éthologie, l’écologie et les approches somatiques ...
Au-delà des mots, il s’agit d’inventer une forme théâtrale hybride, qui convoque l’évènement de la métamorphose et l’émotion qui l’accompagne. Invitation à voir... A voir un quelque chose muter, devenir un tout autre. Le plateau de théâtre, tel un grand laboratoire, pour explorer l’impermanence, le ux du désir et du vivant...
Pascal CROCHET

Distribution

JEU Maxime Anselin, François Badoud, Dolorès Delahaut, Stéphanie Goemaere, Thierry Lefèvre, Sylvie Perederejew, Camille Rasera, Hélène Theunissen, Laurent Tisseyre.
SCÉNOGRAPHIE Satu Peltoniemi
TRAVAIL DU MOUVEMENT Anne-Rose Goyet
COSTUMES Satu Peltoniemi, Anne Compère
CRÉATION SONORE Raymond Delepierre & Pascal Crochet
CRÉATION LUMIÈRES Florence Richard
RÉGIE Nicola Pavoni & Justine Hautenauve
RÉGIE PLATEAU Luis Vergara Santiago
DIRECTION TECHNIQUE / CONSTRUCTION DU DÉCOR Stéphane Ledune, Frédéric Nicaise & Simon Detienne
ASSISTANAT À LA MISE EN SCÈNE Boriana Todorova
CONCEPTION & MISE EN SCÈNE Pascal Crochet

PRODUCTION Théâtre en Liberté
COPRODUCTION La Coop asbl
Avec l’aide de Distinguo et le soutien du Centre des Arts Scéniques.
Avec le soutien de Shelterprod, Taxshelter.be, ING et du Tax-Shelter du gouvernement fédéral belge.

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Lundi 15 janvier 2018, par Didier Béclard

Une fable écologique

Théâtre en Liberté et Pascal Crochet s’inspirent d’un poème d’Ovide pour susciter une réflexion, indispensable, sur le rapport entre l’homme et son environnement vivant.

Une table sur laquelle repose un livre. Un homme ouvre le grimoire précautionneusement et lit : « Avant la mer, avant la terre et le ciel qui couvre tout, la nature dans l’univers entier, offrait un seul et même aspect ; on l’a appelé le chaos ; ce n’était qu’une masse informe et confuse, rien qu’un bloc inerte, un entassement d’éléments mal unis et discordants. » Après sa lecture, il plonge l’ouvrage dans un aquarium.
Trois hommes sortent d’une cabane et déposent huit plantes vertes en pot, derniers vestiges du monde végétal. Ce qui ressemble à une forêt, en fond de scène, n’est qu’un assemblage de planches et de poutres. Ils scrutent le ciel cherchant des oiseaux qui ne viennent jamais. Ils sortent les feuilles de l’aquarium pour les mettre à sécher et tour à tour lisent le texte qui les recouvre.

« Métamorphoses » est né à l’initiative de la compagnie Théâtre en Liberté qui a proposé à Pscal Crochet d’assurer la mise en scène.Il s’est inspiré d’un poème d’Ovide qui conte deux cent trente et une histoires de métamorphoses qu’il a croisé avec des extraits de textes contemporains au sujet de l’écologie, du monde animal, du monde végétal. Plutôt que de s’attacher à un texte théâtral, Pascal Crochet travaille sur des matières, des thématiques, des images. Cela donne une fable écologique dont nous sommes à la fois les patients et les médecins. Dans ce monde en perpétuel changement tout se transforme, « tout bouge, rien ne périt ».

Et Pascal Crochet pousse la métamorphose jusque dans le jeu des neuf comédiens, les corps se mouvent, parfois nus, comme le dernier territoire naturel dans un décor apocalyptique. La métamorphose se retrouve encore dans la création du texte basée sur l’écriture de plateau, un texte qui s’est élaboré au cours des répétitions, chaque comédien devenant ainsi créateur. Ce qui provoque par moment une certaine confusion de par la juxtaposition de monologues qui ne répondent pas nécessairement. Reste que l’ensemble s’interroge fort à propos sur le rapport de l’homme avec son environnement. Pascal Crochet conclut : « S’il y a bien une question centrale aujourd’hui, c’est comment l’homme se positionne par rapport au monde vivant qui l’entoure. Si l’on n’aborde pas cette question-là, c’est la fin de l’humanité, tout simplement. »

« Métamorphoses » d’après Ovide, mise en scène de Pascal Crochet, jusqu’au 10 février au Théâtre des Martyrs à Bruxelles, 02/223.32.08, theatre-martyrs.be.

Lundi 5 février 2018, par Palmina Di Meo

Interview de Maxime Anselin

Comédien dans la pièce Métamorphose de Pascal Crochet

Pascal Crochet, orfèvre du mouvement, cueille dans les mots d’Ovide la source
d’inspiration d’un spectacle total, sensoriel, illustration accomplie de l’incipit : « Je me
propose de dire les métamorphoses des formes en des corps nouveaux ».
Maxime Anselin nous parle de son expérience partagée en tant que comédien au sein de
la troupe du Théâtre en Liberté.


A partir d’un texte de l’Antiquité, « Les métamorphoses » d’Ovide, un recueil de 231
histoires, on parle de problèmes contemporains, Maxime, comment cette transmission s’est-elle produite ?

Maxime Anselin : L’idée vient d’Hélène Theunissen. Travaillant sur « Le songe d’une nuit d’été » dans lequel Shakespeare parle du mythe de Pyrame et Thisbée qui fait partie des Métamorphoses,elle avait été séduite par le texte et elle a proposé de faire appel à Pascal Crochet pour le monter. Les Métamorphoses, ce sont les mythes fondateurs de l’Antiquité grecque et romaine. Il y est question de tous les mythes que l’on connait : de Narcisse, d’Orphée, le tout repris dans un long poème écrit il y a deux mille ans. Le challenge est justement de trouver comment transposer ces vieilles histoires qui restent très actuelles sur scène sans que cela ne paraisse poussiéreux. Pascal Crochet a eu l’idée de passer par le prisme de Pythagore qui est présent dans les Métamorphoses d’Ovide et qui parle du fait que le
monde est en perpétuelle évolution, tout apparait et disparait constamment.
C’est à partir de Pythagore que Pascal fait le lien avec des auteurs contemporains qui eux aussi s’intéressent au monde en évolution, à l’écologie, à comment ce monde est devenu ce qu’il est et comment nous pourrions réagir. Dans cette matière apportée par ces divers penseurs, Pascal a fait une première sélection et nous avons continué de manière à tout mettre en place.

La pièce comme on peut le voir dans le teaser est très visuelle. Quel travail cela a-t ‘il exigé ?
(https://www.youtube.com/watch?v=TrePBiIT68k)

Maxime Anselin : Sur base des textes choisis, Pascal a créé un espace. Ensemble, nous avons imaginé des personnages qui forment une « communauté » vivant dans un « No man’s land’, un espace assez « vague » que pour libérer l’imaginaire au spectateur. Est-ce un monde apocalyptique, une espace « à part » dans la société ? ... Ces gens sont des inquiets qui s‘interrogent sur le monde, sur la manière de faire subsister ce qui en reste et ce qui n’existe plus, comment le récréer ? À partir de là, nous avons commencé à improviser puisqu’il s’agit d’une écriture de plateau.

Et le texte d’Ovide, comment l’avez-vous utilisé ?

Maxime Anselin : Et bien pour ces gens, le texte des Métamorphoses d’Ovide va littéralement tomber du ciel et même prendre possession d’eux-mêmes.

Au niveau esthétique, la bande de son règle les mouvements très construits, qui je suppose ne sont pas évidents pour les comédiens.

Maxime Anselin : L’ensemble a été pensé comme le passage d’un tableau à un autre. Nous bénéficions du talent d’une équipe importante autour de nous. Au niveau du son, on a Raymond Delepierre, Florence Richard a créé les lumières, Satu Peltoniemi la scénographie et les costumes. Dès le départ, nous avons travaillé avec l’aide de la scénographie, avec les sons et les lumières, l’idée étant de rendre le texte accessible. L’improvisation a servi à dénouer le fil conducteur. Cette scénographie-là dépeint un monde post-apocalyptique. Au centre de la scène, trône un énorme bac rempli de terre avec des arbres récréés au moyen de planches en bois pour montrer que le vivant
n’existe plus... La nature a disparu, mais on essaye de la recréer dans une tentative de conserver ce qui peut l’être. On va donc suivre cette communauté dans sa vie quotidienne, on les voit manger, prendre le thé, faire des expériences parfois un peu « particulières ». Pour ce qui concerne le travail du corps, avec Anne Rose Goyet, on a utilisé les mouvements taï chi pour chercher comment ces personnages évoluent puisque leur expérimentation passe par les mouvements de leurs corps. Pascal Crochet a voulu « déréaliser » les mouvements, on ne marche pas comme dans la vie réelle, on est
animé par quelque chose, une inquiétude, une intranquillité, et les mouvements en sont nourris. Par moments, la pensée d’Ovide nous possède à tel point que l’on est traversé par une transe, le corps est comme saisi par une force extérieure. Cela tient du théâtre danse.

Le spectacle est un succès incontestable, comment le public reçoit-il le spectacle ?

Maxime Anselin : À l’avant-scène, un texte se dit pendant qu’une expérience est en cours sur le côté alors qu’une image métaphorique apparaît à l’arrière... Du coup, le public ne voit pas le temps passer. Il reçoit le spectacle comme une expérience théâtrale qui donne à réfléchir et qui en met plein des yeux. Et donc les textes s’insinuent en nous et soulèvent des questions sans que nous ayons l’impression que l’on nous fait la leçon.

Un texte d’Ovide, texte poétique et antique, est-ce évident de le faire parler aujourd’hui ?

Maxime Anselin : Dans l’Antiquité, les personnages changeaient par le fait qu’ils étaient
transformés en animaux, en arbres, en pierre... Parce qu’ils avaient « fauté », les dieux se vengeaient sur eux en les transformant en matière naturelle comme pour dire : « Vous avez voulu porter atteinte à la nature et bien, vous allez devenir ce que vous détruisez. Dans ce monde qui se métamorphose, nous-mêmes, nous nous métamorphosons tout en continuant à métamorphoser le monde... On finit par subir ce qu’on a créé, par être puni par où on a « péché »

Parlant de transformation et de rédemption, quelle est philosophie de la pièce ?

Maxime Anselin : Tout spectacle est une expérience. Nous n’avons pas voulu donner de réponses aux interrogations. Notre objectif a été de donner des visions, de véhiculer des pensées mais sans donner une vraie réponse... Chacun est libre d’interpréter chaque image. Le propos est de faire état d’un monde en train de s’autodétruire avec des évolutions positives... Mais par le progrès, la surmédiatisation, l’homme en est arrivé à un point où il est nécessaire de faire entendre des sonnettes d’alarme et de s’interroger sur notre survie.

Propos recueillis par Palmina Di Meo

Théâtre des Martyrs