Le froid s’intensifiant, la question de la survie se pose. Les livres sont les derniers combustibles salvateurs de quelques instants de bien-être physique.
Le dilemme devient cornélien. Que va-t-on brûler, que va-t-on sauver ? Les choix diffèrent. Le vieux professeur lassé d’érudition préfère les romans de gare ou à l’eau de rose ; Daniel, jeune idéaliste, persiste à croire que les mots peuvent changer le monde ; quant à Marina, la seule chose qui compte est le soulagement immédiat de la douleur.
« Les combustibles » est l’unique pièce de théâtre d’Amélie Nothomb. Écrite en 3 actes en 1994, au début de sa carrière, elle interroge la place de la littérature et de la culture dans la société. Quelle est sa position dans la « hiérarchie des besoins », a-t-elle un sens le ventre creux ?
Au fur et à mesure que la bibliothèque se consume, le cynisme s’enflamme et les protagonistes perdent leurs repères jusqu’à l’animalité la plus primaire. Dehors la ville est bombardée, c’est probablement la fin d’un empire qui emporte avec lui ses fondements culturels. Quel peut être le sens de la vie dans une société dont les valeurs sont démantelées ?
Chacun y répond de manière individuelle mais in fine la réponse est sans appel pour tous. Les dialogues sont aussi glaciaux que l’ambiance de la pièce. Pas de respiration dans ce texte noir et désabusé sauf quelques ultimes sursauts avant le plongeon final. La plume alerte d’Amélie Nothomb et son sens inné des dialogues et des bons mots font oublier une dramaturgie qui manque parfois de rythme pour tomber dans le bavardage. Les comédiens soutiennent le texte avec brio, s’investissant à fond dans ces personnages coincés dans le marasme.
Une pièce à voir pour la mélancolie qui s’en dégage et le flirt espiègle d’Amélie Nothomb avec le monde universitaire, ses hypocrisies et son autosuffisance.
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