Jeudi 20 mars 2008

Le bonheur d’être nus !

Qu’est-ce que ça fait comme effet de se tenir tout nu devant une ou plusieurs paire(s) d’yeux, qui vous regarde(nt) durant une ou plusieurs heure(s), et de voir ensuite les moindres détails de votre anatomie reproduits sur une feuille de papier à dessin ? Si cette question vous taraude, vous devez absolument aller voir Modèles vivants. Et si elle ne vous taraude pas, vous passerez quand même une excellente soirée de plaisir et de détente au Théâtre du Méridien.

Du poseur professionnel à l’agenda overbooké à la jeune femme qui a posé une seule fois dans sa vie et qui n’a toujours pas bien compris ce qui lui est arrivé, en passant par la comédienne médiocre reconvertie en modèle et par la dame âgée qui se souvient de ses années de jeune épouse où elle posait en cachette pour son voisin peintre. C’est cela, Modèles vivants : quatre personnages hauts en couleurs, quatre expériences, quatre récits sincères, drôles, touchants, et surtout quatre comédiens au jeu plein de verve, de dynamisme et de finesse.

Sous la houlette de l’auteur, Régis Duqué, et de Guillaume Istace, nos quatre poseurs exposent chacun à leur tour leur "première fois", leurs impressions, leurs souvenirs, leurs angoisses, leur satisfaction aussi. La pièce est donc construite en quatre monologues successifs. La mise en scène n’en est pas moins chorale, et c’est la plus belle réussite du spectacle. Pendant que chacun des acteurs présente son récit, les trois autres le matent avec un air de détachement teinté de bienveillance. Entre les monologues, des intermèdes musicaux réunissent les quatre modèles qui semblent alors se décharger d’une tension et partager en même temps un moment de complicité. L’ensemble y gagne en cohérence et en rythme. Le tout se déroule sur une scène pourvue de quelques sièges et de deux tringles où pendent des vêtements aux couleurs chatoyantes et à la texture molle et sensuelle, à l’image des mots généreux de Régis Duqué. Par contre, la projection d’images sur un écran de fond de scène n’était peut-être pas nécessaire, le texte étant déjà suffisamment imagé et porté par des acteurs très expressifs. Mais c’est bien là le seul petit bémol de ce beau projet.

Soyez voyeurs pour un soir, vous ne le regretterez pas !