Comme décor, des projections sobres et soignées du Bruxelles d’autrefois (images collectées par Gaspard Giersé), variant au gré du récit. Sur scène, une table et deux chaises matérialisent le commissariat ou le cabinet du docteur. Comme Mathilde Rault qui se métamorphose à la vitesse de l’éclair (assistante du docteur, sœur de Maria etc…), Othmane Moumen endosse un grand nombre de rôles avec brio.
D’entrée de jeu, le docteur Gasparri est interrogé dans un commissariat. Progressivement, on découvre l’histoire qu’il relate à l’aide de flashbacks.
Initialement, l’idée était de faire un film de ce suspense littéraire mais ce projet n’a pas encore pu se concrétiser. Gasparri est touché par la situation très précaire d’un couple d’émigrés italien, les Guareschi. Accompagnés de leur bébé, ils sont venus en consultation parce que Maria, la maman du bébé, est victime d’une intoxication au sulfure de carbone. Vu le contexte économico-social de l’époque (grèves, fermetures d’usine etc…), la situation de cette petite famille se dégrade rapidement et le docteur, originaire de la même région que la jeune femme, prend à cœur de les aider.
A l’époque, Bruxelles est la plaque tournante des antifascistes. Les militants italiens viennent en Belgique, fuyant l’Italie dirigée par Mussolini depuis 1922. La sœur de Maria, Francesca, politiquement très active, débarque à Bruxelles chez les Guareschi mettant en danger les protégés du docteur.
La pièce questionne sur l’engagement de chaque citoyen et sur les conséquences de cet engagement. Francesca essayer de convaincre le docteur, « Ne pas s’intéresser à la politique, c’est comme se ligaturer la conscience ». Le docteur n’est pas prêt à dépasser les limites que lui fixe la charité chrétienne. Le spectacle offre plusieurs niveaux de lecture : un suspense, un rappel historique et une question philosophique. Servies par une interprétation de premier choix (on ne doit même plus souligner le talent d’Othmane Moumen), les 90 minutes que dure la pièce se déroulent rapidement et rafraichissent les mémoires. A voir, parce que les idées nauséabondes font malheureusement long feu.