La Estupidez
Dans La Estupidez, l’auteur, Rafael Spregelburd, esquisse le portrait d’un monde où la stupidité est sans conteste, avec l’argent, l’une des données fondamentales. Du mélodrame au sitcom en passant par le road-movie, les séries américaines des années 1970 et le théâtre de l’absurde, il offre un ensemble hétéroclite toujours drôle, oscillant entre franche comédie et humour plus grinçant. Avec une langue foisonnante qui éclate comme un feu d’artifice de mots, ce sont cinq histoires qui s’enchevêtrent et avancent parallèlement dans des motels sordides de Las Vegas. Ce sont aussi vingt-cinq personnages interprétés par cinq comédiens qui déambulent, vivent, travaillent, trafiquent dans des réalités différentes et pourtant simultanées. Cette « connerie » ne connaît pas de mesure : le texte est décapant, le jeu est d’une vitalité débordante et l’histoire est d’une folie sans borne… La connerie serait-elle encore un péché capital ?
Avec : Bernard Breuse, Miguel Decleire, Kristien De Proost, Pierre Sartenaer, Mélanie Zucconi
Mardi 13 octobre 2015,
par
Julie Lemaire
Las Vegas stupido !
Pour la première fois depuis sa création en 1996, la compagnie belge Transquinquennal met en scène un texte déjà existant : La Estupidez, de l’auteur argentin Rafael Spregelburd. Cinq histoires s’enchevêtrent dans un lieu commun : une chambre de motel dans le temple de l’argent sale, Las Vegas. La compagnie prend ces histoires assez banales avec humour, dérision et dernier degré, et l’on reste captivé un moment à en écouter la stupidité incarnée.
Oui, les comédiens rivalisent d’excellence dans les changements de rôles qu’ils incarnent dans la personnalité, l’allure, la langue, l’accent, jusqu’au bout du costume. Oui, la scénographie est tellement kitch que l’on sourit du contraste entre un théâtre belge qui cherche toujours l’avant-garde et un vieux motel de Las Vegas au réalisme décapent. Oui, les échanges entre les 25 personnages sont aussi intenses que les destins qui se croisent sont vils. Oui, les personnages sont psychologiquement fouillés, en même temps que réels archétypes de comédie humaine, et oui, enfin, l’auteur représente bien ce qu’il voit comme un péché capital moderne : la stupidité - si universelle qu’entre l’origine de l’auteur et la volonté de tourner en dérision la culture télé américaine, on s’y retrouve.
Mais ensuite ? Ces ingrédients magiques sont-ils absolument suffisants pour garder le public en haleine avec des bouts de vie insignifiants exposés dans des discussions autour du vide abyssal de leurs préoccupations ? Cherche-t-on à atteindre les nerfs d’un public trop éduqué en le confrontant, dans un temps théâtral infini, à la stupidité humaine, comme si la côtoyer chaque jour ne nous permettait pas de la regarder en face pendant trois heures ? Que ressort-il de cette expérience de survie en milieu hostile, si ce n’est la salutation de la prouesse de jeu et de fluidité dans la mise en scène, car au final, à l’inverse de leur création bouleversante de beauté « Quarante-et-un », on attend la suite.
Julie Lemaire
Lundi 23 avril 2012,
par
Karolina Svobodova
L’homme était bête car l’homme était avare
Un policier attend son collègue et amant, des marchands d’arts montent une escroquerie pour vendre un tableau qui perd ses couleurs, un mathématicien découvre une formule laquelle, introduite dans un ordinateur quantique, permettra de prévoir l’avenir,... Toutes ces scènes et bien d’autres se déroulent simultanément dans un motel quelconque à la périphérie de Las Vegas. Cinq histoires pour représenter les diverses facettes de la bêtise humaine, cinq acteurs pour donner corps aux 25 personnages de la pièce de Rafael Spregelburd, voilà un petit aperçu de la nouvelle création de Transquinquennal. Une occasion de découvrir cet auteur argentin et de rire de nos travers.
Parmi les sept péchés capitaux, La Estupidez traite de l’avarice : à travers des scènes burlesques, elle en souligne la stupidité. Ce vaste thème se révèle être un terrain de jeu fertile pour le collectif bruxellois lequel, depuis dix ans, explore avec intelligence et humour notre quotidienneté.
Le texte se veut un faux vaudeville et c’est donc avec un certain décalage ironique que les acteurs se lancent dans des situations banales et absurdes à la fois, s’amusant avec les codes de ce genre bien spécifique.
La scénographie de Maria Szernovicz fournit un cadre réaliste aux déambulations des comédiens. En reconstruisant sur scène l’intérieur d’un de ces hôtels des bords de l’autoroute, ce décor donne l’impression au spectateur d’être face à un plateau de tournage tout en renforçant la théâtralité du jeu.
Entre le mini bar et le tableau kitsch accroché au-dessus du lit, rien ne manque. Les costumes eux-mêmes jouent sur les clichés que l’on peut avoir des personnages types des films américains. L’effet est comique et le public rit de bon coeur, si bien qu’on sent à peine passer les 3 heures 15 que dure la représentation. Attention tout de même si vous dépendez des transports en commun pour rentrer chez vous. Il y a de fortes chances que vous devrez faire le trajet à pied... Et sous la pluie ça risque un peu de gâcher le plaisir de la soirée.
Karolina Svobodova
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