L’humanité

Bruxelles | Théâtre | Théâtre National Wallonie-Bruxelles

Dates
Du 25 au 27 mars 2019
Horaires
Tableau des horaires
Théâtre National Wallonie-Bruxelles
Boulevard Emile Jacqmain, 111 1000 Bruxelles
Contact
http://www.theatrenational.be
info@theatrenational.be
+32 2 203 41 55

Moyenne des spectateurs

star-offstar-offstar-offstar-offstar-off

Nombre de votes: 0

L’humanité

« Aucune bête n’a été autant diffamée que l’être humain. » C’est en substance la thèse développée par l’écrivain hollandais Arnon Grunberg dans son essai de 2001 De Mensheid Zij Geprezen (Louée soit l’humanité).

Reprenant la théorie de Grunberg, Josse De Pauw se présente à la barre et se fait l’avocat de cet humain si injustement décrié : en collaboration avec le pianiste Kris Defoort, dont la partition et les improvisations l’accompagnent de bout en bout, il imagine un grand plaidoyer dans lequel il convoque artistes et penseurs – de Stanley Kubrick à Balzac, en passant par Bertolt Brecht ou Francis Bacon – tous accusés d’avoir toujours souligné ses pires travers. Il est aidé dans sa mission de réhabilitation par la soprano américaine Claron McFadden.

Josse De Pauw propose une nouvelle de ces compositions poétiques et musicales dont il a le secret. Une mise en abyme drôle et brillante dans laquelle Arnon Grunberg lui-même incarne cet humain, imparfait et seul, comme attaché au rameur sur lequel il s’échine et qui tente en vain d’échapper à sa condition.

Laissez nous un avis !

Un message, un commentaire ?

Qui êtes-vous ?
    Se connecter
Votre message

Vendredi 29 mars 2019, par Laure Primerano

Rebondissements judiciaires

Du Vicomte de Valmont à Alex DeLarge....quel espoir reste-t-il encore pour l’Humanité ? L’auteur des Lundis Bleus porte aujourd’hui le fruit de ses réflexions sur les planches du théâtre. Faites entrer l’accusé !

Dans la grande salle du Théâtre National, face à un public curieux, l’écrivain Hollandais Arnon Grunberg envoie à la barre Josse de Pauw. Le texte est une adaptation de “De Mensheid Zij Geprezen” (Louée soit l’Humanité), essai que Grunberg publie en 2001, alors qu’il n’a que 30 ans. Si le texte original a été retravaillé pour la scène, sa volonté primale reste inchangée : défendre l’Humanité. Sur le banc des accusés figurent des têtes bien connues : Balzac, le Marquis de Sade, Giacomo Leopardi.... Autant de grands penseurs et d’artistes qui, de tout temps, se sont plus à diffamer l’homme, à pointer le vice inhérent qui habite sa nature. Confronté à ces siècles d’accusations, Josse de Pauw tente, par un plaidoyer fougueux, de redorer le blason d’une humanité fourvoyée. Les mots sont forts, parfois même choquants et alors qu’il tente d’expliquer, d’excuser les faiblesses de la nature humaine, l’avocat pointe aussi avec une lucidité effrayante les travers de cette race qu’il dit tant aimer.

À l’image d’une cours de justice, le plateau, orné d’un simple cadre de bois, est solennel. En son centre, accroché à la barre, l’acteur cherche à captiver son audience. Dans cette entreprise, il est accompagné par deux forces artistiques : chaque soir, le pianiste Christian Mendoza et la soprano Claron McFadden improvisent sur scène. Insufflant à l’œuvre une nouvelle intensité dramatique, ils appuient de leurs envolées lyriques tantôt un mot, tantôt une pause qui incite à la réflexion. À la fois partie intégrante du spectacle et électrons libres, ils aident à soutenir l’attention du spectateur dans les moments où le texte écrit se fait par trop sentir.

« L’Humanité » oscille sans cesse entre fiction et réalité et les frontières du jeu y sont poreuses. Alors que le spectacle touche à sa fin, le monologue vindicatif devient, avec l’intervention de Grunberg lui-même, dialogue satyrique. Ensemble, De Pauw et Grunberg détricotent le véhément discours dont ils sont pourtant les instigateurs. Des choix des mots à la mise en scène, tout est analysé avec recul, mis en contexte. En toile de fond, cette question, telle une grande inconnue : l’être humain a-t-il été réhabilité ? Le spectacle nous laisse avec un doute infini pour toute note de fin.

Amateurs de boucles bouclées, passez votre chemin, l’Humanité soulève plus de questions qu’il n’apporte de réponses. Embarqué dans un débat qui par moments semble le dépasser, le spectacle soutient parfois une opinion et parfois son contraire, sans jamais vraiment se poser. Un parti pris qui laissera l’esprit de certains aussi confus qu’une girouette un soir de tempête.

Théâtre National Wallonie-Bruxelles