À l’heure de la montée de plus en plus inquiétante des mouvements d’extrême droite, de la résurgence des nationalismes et du rejet des mouvements migratoires, L.U.C.A tente de répondre à une question, somme toute simple, mais qui semble aujourd’hui revêtir une importance capitale : Et toi ? Tu viens d’où ?
Subtil mélange de théâtre et de conférence-documentaire, le spectacle s’appuie, pour répondre à sa question fondatrice, sur l’histoire personnelle des acteurs, tout deux descendants de l’immigration minière Italienne en Belgique. Un parcours familial qui, dans cette ville où les terrils semblent encore chauds, trouve une résonance toute particulière avec le public.
Commence alors un long voyage à travers les chemins incertains de la généalogie. Armés de seuls marqueurs blancs, le duo se voit sans cesse ramené vers des réponses qui n’en sont pas, acculé dans des impasses hasardeuses. Au travers de témoignages familiaux et de révélations faites à demi-mots, se dessinent des origines plus floues que ce que l’on se plaisait à imaginer. L’enthousiasme des débuts fait place à la frustration de l’inconnu.
Cette quête de vérité idéalisée, contrecarrée d’emblée par la réalité humaine qui sous-tend toute migration, donne à la pièce un encrage ferme dans la réalité et rend palpable tout le ridicule d’une question répétée à l’excès, tel un bouclier brandi face à l’ennemi.
Alors que la frustration s’installe, L.U.C.A gomme peu à peu les contours de l’histoire familiale pour laisser apparaître une histoire plus vaste de l’être humain. Au-delà du personnel et du sentimental, c’est désormais dans les gênes que nos protagonistes cherchent leurs réponses. Sans jamais se départir de l’humour mordant qui les caractérise, Carnoli et Guerrisi révèlent, à l’échelle de milliers d’années, les émotions d’une vie humaine. Ils interrogent avec pertinence les concepts de migration et d’origines, dans une mise en perspective qui rend d’autant plus absurde le fonctionnement de la société d’aujourd’hui.
Les propos de L.U.C.A sont forts et la pièce sait toujours trouver le ton juste pour faire raisonner au fond de nous des sentiments que, sans doute, la politisation de la question humaine avait enfouis sous une épaisse couche d’indifférence.