De l’escarpolette de l’enfance jusqu’aux pierres de Ramalah, Cécile Vangrieken incarne avec humour et passion cette jeune idéaliste, lumineusement intelligente, qui dès l’enfance sera sensibilisée au chaos mondial et le sens de son engagement face à la souffrance humaine. Au delà du symbole, au delà de sa mort, nous découvrons une femme bien réelle, accro à la cigarette, qui se définissait comme écervelée, déviante et trop bruyante. Ni sainte, ni traîtresse, à la fois sérieuse et drôle, bordélique et pleine de talent, Rachel écrit des poèmes sur ses chats admire Dali et Pat Bénatar, la reine du rock féminin . Une martyre, pour certains, une grande naïve pour d’autres, elle est cette jeunesse qui se bat et croit encore à la solidarité humaine.
En filigrane, Rachel ouvre la porte sur sa relation à ses parents, à qui elle confie ses questions, sa volonté d’échapper à un monde où elle n’a que des privilèges. Après avoir parlé de la peur des Palestiniens, elle leur parle de ses propres angoisses. Et pourtant, elle veut bouger, voir, écrire…Pourrait-elle le faire, calfeutrée dans sa maison de poupées et le jardin d’agrément où elle a grandi ? Elle a décidé de combattre ses démons et prend le risque de vivre à fond les valeurs et rêves que ses parents lui ont transmis, au risque de leur faire de la peine, au risque de les faire souffrir. Echange de mots simples, d’émotions tellement compréhensibles.
Ce spectacle n’est pas un pamphlet contre un pays ou un peuple en particulier. On peut regretter que certaines représentations aient été reportées, voire annulées à New-York et à Montréal pour raisons politiques. Toujours les mêmes amalgames. Et pourtant, comme Rachel nous le dit clairement, on peut contester la politique d’Israël sans être anti-sémite. On peut être sensible à la souffrance du peuple palestinien sans cautionner les actes terroristes. En adaptant ce spectacle pour la scène, l’auteur n’avait d’autre objectif que celui de montrer l’absurdité des guerres et les horreurs qu’elles engendrent.
Le décor est sobre et symbolique. Toute notre attention est concentrée sur Rachel, son énergie et le crescendo de ses émotions. On peut toutefois regretter certaines longueurs dans le monologue, lorsque le cœur s’emballe. Face à Rachel, un acteur de taille : un très large écran qui occupe toute l’arrière-scène. Ce type d’interaction n’est pas nouveau mais cet écran nous parle. Nous entendrons un jeune homme relatant les circonstances de la mort de la jeune activiste. Gros plan sur les bulldozers. Cette image en évoque une autre, qui a fait le tour du monde en 1967 : Une fleur contre les baïonnettes. La jeunesse américaine se mobilisait contre la guerre au Vietnam et osait investir le Pentagone, citadelle de la plus puissante armée du monde.
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