Tout, tout est parti de là : Z-avez pas vu Mirza ? Ce n’est pas Mirza, mais le chien Toutou, qui s’est volatilisé. Son maître, Alex, prof de philo, distrait par sa conversation avec la voisine n’a pas vu l’animal allergique à la laisse, se barrer en douce pendant la promenade vespérale obligatoire. Difficile de trouver un mensonge crédible pour couvrir le crime ! Au retour, le maître (Daniel Hanssens) très penaud en apparences, déclenche un tsunami qui va ravager le couple sans enfant. Une première dispute éclate à propos de l’avis de recherche qu’ils vont afficher dans le quartier : « - Un grand chien miel, - non gris ! - non, gris-miel ! »Toutes les suppositions les plus folles vont défiler quant à la motivation de l’animal en fugue. Effet papillon : la vie de couple d’Alex et de Zoé va s’écrouler de A à Z car les voilà subitement privés de leur tiers favori, leur catalyseur empêcheur de disputes. Voilà la jalousie qui prend racine, les fantasmes du mari cabotin qui ravagent le cœur de l’épouse sur le qui-vive, le passé houleux qui revient !
C’est l’excellente comédienne Laurence d’Amélio qui joue Zoé, cette femme de terrain extrêmement féminine, mobile et versatile, exquise dans ses postures, ses regards assassins, ses volte-face et ses silences songeurs.
Heureusement, voici bientôt un autre tiers, leur ami commun Pavel (Pierre Pigeolet, superbe comédien) qui débarque chez eux en plein milieu de la nuit. Il est revenu de Rome où il a construit un hôpital et semble avoir paumé ses clefs d’appartement. Quiproquos savoureux, colères alternées, désespoir, reproches mutuels et surtout les frustrations d’une vie commune font alors gaiement surface. Et l’amitié dans tout cela ? Tensions, non-dits, griefs conjugaux s’accumulent. Après tout, est ce qu’Alex aime vraiment Toutou ? Tout, Tout est vraiment chargé d’histoire. Qui aime qui ? C’est le grand déballage, jusqu’à la remise en question du couple. Le linge sale que l’on ne lave, soi-disant, qu’en famille, est lavé devant l’ami Pavel totalement ahuri, pris tour à tour …à témoin et à partie.
Pavel était lui aussi en Roumanie dans leur jeunesse et va raviver ces anciens secrets si bien évacués pour la paix des ménages. Deuxième vague d’affects qui partent tous azimuts, encore plus destructrice que la première. Contraste comique : le tout se joue dans un décor très élégant d’un appartement du 16e, nul doute, dans les tons miels et bleu serein. Le panier du chien anthropomorphe reste tristement vide malgré les oraisons et litanies désespérées des propriétaires en crise existentielle majeure. On vous laisse découvrir la fin, la clé est évidemment cachée dans le trio. La pièce est, elle, du plus grand brio théâtral !