Deux anges qui ont eu une permission d’une heure incognito sur la Terra Cognita. Il n’en faut pas plus au jeune auteur pour secréter un texte magnifique composé avec soin, en sept tableaux à l’écriture fine et ciselée. Cognita en effet, malgré le titre, car nous connaissons tous ces sept cercles de la terre et ce qui s’y passe comme cruauté, souffrances et abominations, mais les scènes présentées le sont avec infiniment de délicatesse. C’est le germe de l’espoir à l’œuvre. Ou l’oeuvre de l’espoir ? Comme le dit très bien Beaudelaire, "L’orage rajeunit les fleurs et donne un nouvel espoir". Par le truchement d’une très belle langue imagée, fluide et poétique, et d’une non moins belle interprétation scénique, le spectateur survole de ses ailes d’ange lui aussi le terroir humain « that really needs improvement » comme l’on dit en langue polically correcte.
Certes il y a toute la place voulue pour le progrès, et c’est ce que l’on espère en ressortant de ce spectacle très percutant et très peu anodin malgré les apparences. Ce texte beau comme un carnet d’aquarelles n’a pas encore trouvé d’éditeur et pourtant le texte a fait se rencontrer deux comédiens en totale symbiose. Symbiose contagieuse, il va de soit. On lui souhaite bon vent et surtout de nombreux lieux d’accueil car il porte en lui les germes du changement.
Une création utile que l’on voudrait appuyer de manière forte. Ainsi que ce petit lieu préservé du consumérisme qu’est le ravissant théâtre de la Clarencière où, infatigable, Fabienne Govaerts œuvre sans relâche depuis 15 ans pour promouvoir les Belles Lettres Françaises, le plaisir du théâtre et la convivialité. La crise n’émousse pas la curiosité de son Public, ni la créativité des artistes invités à se produire entre ses murs accueillants. Les meilleurs spectacles, elle les emporte à Avignon sous pavillon belge. Quand ce n’est pas jusqu’en Afrique, au Sénégal ! Ce lieu est à Bruxelles l’une des rares pépinières du futur !
Du questionnement contemporain sans compromission est bien le propos de cette pièce de Sébastien Vanden Berghe. Une belle réponse aux inquiétudes du siècle, avec des conclusions en devenir, un bon antidote à l’esprit de sinistrose ambiant, quand on savoure la connivence théâtrale des deux anges antinomiques.
Extrait :
Ménadel : Et si le corps était la note ultime, celle d’une danse sacrée tournée vers la lumière ?
Seraient-ils ces enfants-là, ces porteurs d’espoir, ces chanteurs du possible ?
Si le corps était une prière élancée vers le ciel étoilé ?
S’ils étaient tout ce que l’on nous cache, cette parenthèse enchantée ?"
Question :
Quand on rencontre un ange, qu’est-ce qu’on dit ? Qu’est-ce qu’on fait ? On s’envole ! Merci à la directrice de théâtre pour cette rencontre ailée...