Ecouter Scelsi c’est accepter que la musique n’a pas besoin d’être entendue avec autre chose que ses oreilles pour exister. Aussi faut-il accepter de se perdre, de laisser son intuition vagabonder puis son attention reprendre le dessus. Il y a dans la musiques de Scelsi quelque chose d’indicible et de hautement spirituel, quelque chose de forcément philosophique aussi à travers la métaphysique du timbre, mais toujours comme ça, mine de rien. La musique de Scelsi ne titille pas ouvertement l’intellect, mais de l’écoute de ces pièces on ressort intimement transformé, c’est à dire que notre idée de la musique n’est plus pareille, peut-être est-elle plus complète. L’auditeur pourra s’il le désire tenter de s’expliquer en quoi cette transformation s’est opérée, mais libre à lui de laisser le mystère pur sans en pervertir l’essence, car la musique de Scelsi ne prend personne en otage. Cette musique ce ne sont que des sons, juste des sons.
Le programme que nous propose le Senghor est centré autour de pièces pour cordes du compositeur est c’est tant mieux, sa musique est certainement d’autant plus forte qu’elle est écrite pour des instruments capables de faire entendre toutes les hauteurs intermédiaires qui se trouvent dans l’espace que laisse inexploré les instruments aux notes fixées mécaniquement. Aussi la musique pourra osciller autour d’une note, chercher le point de mise en phase de deux hauteurs, glisser du grave a l’aigu dans un continuum, et bien d’autres choses encore ...
Chronique de Joachim Glaude