Hedda, c’est une mise en abime, c’est un miroir. C’est une pièce en train de se monter, dans ses derniers instants de répétition, mais c’est aussi un flot de question dissimulé dans un jeu d’acteur raffiné au sein d’une machinerie théâtrale-cinématogragraphique de grande ampleur, qui relève de la prouesse technique. Deux heures trente-cinq sans entracte et sans une seconde d’ennui. Passionnant, de la narration à la lucidité de la langue, du jeu d’acteur subtil et précis au travail de scénographie impressionnant mais si juste.
Le double décors (plateau de répétition et coulisse) nous mène tour à tour entre fiction et réalité, entre acajou et béton armé, de la modernité au classique. Le vacarme cède au silence - l’art c’est la lutte avec le démon nous dit-on.
Un désir de vie qui pue la tragédie, le fusil de Tchekhov qui annonce la fin et « tu feras attention il est chargé, et ce ne sont pas des balles à blanc », cependant, la représentation théâtrale s’arrête fatalement devant la mort, comme nous l’annonce le personnage de Laure, la menteuse en scène. Nous cherchons à comprendre le seuil. Être sur le rebord et contempler le vide.
On étouffe avec Hedda, on étouffe avec Laure, on étouffe avec toutes ces femmes, celles de 1890 et celle de la modernité. Pas de place pour le vulgaire, le ridicule, place au vacarme et à l’odeur de la poudre.
La bande originale, composée comme celle d’un thriller moderne, nous accompagne à des crêtes émotionnelles et pourtant, Aurore Fattier, loin d’utilisé des procédé théâtraux classique, nous emmène toujours dans l’inattendu, dans le surprenant, dans l’étrange.
La mise en scène de l’angoisse est renversante et nous emmène avec elle dans le bateau ivre de la folie, les plans cinématographiques tantôt fixe, tantôt mouvant, nous amènent d’une réalité à une autre, et, se rapprochant des regards qui se perdent, pénètre toujours plus dans l’intime de l’acteurice-personnage.
Tout simplement grandiose.
Léa Dedeurwaerder