Le spectacle ne démarre pourtant pas sur les chapeaux de roues. Dans les premiers moments, la comédienne prend le temps pour installer un rapport direct avec le public. C’est ce dernier qui, par un système de floches, décidera de la thématique que la jeune femme devra aborder. On pouvait dès lors craindre que le spectacle demeure une succession de sketchs, ce qui n’aurait pas nécessairement été déplaisant. Au contraire, la pièce tire sa force d’une unité qui transcende sa multiplicité. Chaque proposition recèle d’inventivité, chaque tableau apporte sa singularité. Malgré ce découpage en séquences, une véritable narration se construit au fil de la représentation, évoluant du stand-up vers le théâtre le plus expérimentale. L’esthétique s’assombrit graduellement, épousant ainsi notre plongée vers les soubassements de l’âme.
Composite, le spectacle l’est également dans le choix des textes : on retrouvera côte à côte un extrait de Phèdre, un passage de Belle du Seigneur ou encore un fragment de l’Eloge de l’amour du philosophe Alain Badiou. Expression de cette diversité, une foule d’objets entrent sur scène, descendus en rappel par un dispositif de cordes. Progressivement, c’est un joyeux bordel qui peuple le plateau, sorte d’univers surréaliste qui s’échafaude au gré des multiples chutes que rencontre la comédienne. Le mécanisme est simple, mais n’en demeure pas moins diablement efficace. Sans vouloir trop en dévoiler, gageons que le spectateur risque d’être surpris à maintes reprises.
Véritable éventail de technicités, la comédienne Gwen Berrou démontre toute l’étendue de son talent, mariant habilement les formes scéniques les plus éloignées. Grâce à la souplesse de son interprétation, la comédienne parvient à nous emmener dans son monde propre, sans rien devoir sacrifier à l’étrangeté qui l’habite. Pour une première création personnelle, l’oeuvre tient pleinement ses promesses. On regretterait presque que ce Show ne dure pas davantage.