Les formes se font indistinctes jusqu’à se mêler, au moment où la lumière décroît les évidences se perdent. Un sentiment d’étrangeté s’installe et l’imagination s’emballe, rien n’est plus, tout devient possible. Cet instant où les certitudes se font doutes est, avec brio, porté à la scène par Rosalba Torres Guerrero et Lucas Racasse dans leur spectacle interdisciplinaire « Pénombre ».
La danseuse est boule de poils, crinière de cheveux, animal, femme. Elle est changement incessant, mouvement, recherche et fuite à la fois. Grâce à la musique et à la vidéo, nous quittons le domaine de la logique binaire pour prendre place dans l’entre-deux, l’indétermination qui rend la rencontre des opposés possible.
En naît un spectacle résolument hybride dans lequel on peut admirer la rencontre d’artistes issus de disciplines différentes. Un véritable échange dialectique naît entre ces langages divers, aboutissant en un spectacle qu’on peut qualifier de total.
Psychédélique, l’espace sonore et visuel nous fait entrer dans la psyché de la danseuse. Habitée par un fantôme étrange, mi femme, mi enfant, malicieux et bienveillant à la fois, c’est autour de leur relation que la création se construit. Elle cherche à le fuir, elle le poursuit, un dialogue entre vidéo et présence réelle redouble le dialogue de ces deux figures.
L’énergie, la présence et la maîtrise physique de Rosalba Torres Guerrero méritent également d’être soulignées et on ne pourra que conseiller ce spectacle à ceux qui se plaignent du manque de danse dans les créations de la danse contemporaine.