Laissant les sièges du théâtre volontairement vides, Frédéric Dussenne accueille les spectateurs sur la scène de l’Atelier 210, déshabillée pour l’occasion de tous ses artifices. Les mots de Jean Louvet commencent alors à résonner au cœur de cet espace brut et dépouillé. Suspendues dans cette atmosphère froide en quête de chaleur humaine, des enseignes lumineuses exposent des mots aux sens multiples et rappellent une mystérieuse chambre d’hôtel près d’une route oubliée.
C’est dans ce lieu calme et secret que les personnages de Louvet prennent vie pour nous livrer les aléas de la rencontre de deux inconnus. Ce jour-là, au bureau de poste, la main de Jacques s’attarde sur celle d’Edith. A la fois simple et instinctif, ce geste de sympathie va raviver chez eux le besoin profond du contact humain. Avec un naturel déconcertant et une vérité poignante, Véronique Dumont et Fabrice Rodriguez interprètent ces deux âmes heurtées par la solitude et emprisonnées dans un quotidien qui leur échappe.
Jacques et Edith évoluent dans la recherche d’un lien social en perdition, qu’il soit le fruit d’un échange anodin ou d’un geste inattendu de prendre la main. Dans cette perspective, le metteur en scène cultive la proximité au spectateur. Les comédiens déambulent parmi le public, témoin de la naissance d’un amour indéfini entre les personnages. Amplifiées par des silences lourds de sens, les tensions physiques et les regards intenses révèlent des moments de grâce où les sensations restent en suspens.
Par sa forme épurée qui privilégie la qualité d’interprétation et la relation à l’écriture, Comme un secret inavoué s’adresse aux amateurs de la sobriété. En exposant avec finesse les brides d’une intimité dévoilée, Frédéric Dussenne sublime un texte court, à l’image d’une rencontre brève, d’un instant éphémère et sacré.
3 Messages