Botero en Orient

Bruxelles | Spectacle | Théâtre National Wallonie-Bruxelles

Dates
Du 11 au 14 décembre 2019
Horaires
Tableau des horaires
Théâtre National Wallonie-Bruxelles
Boulevard Emile Jacqmain, 111 1000 Bruxelles
Contact
http://www.theatrenational.be
info@theatrenational.be
+32 2 203 41 55

Moyenne des spectateurs

star-offstar-offstar-offstar-offstar-off

Nombre de votes: 0

Botero en Orient

Botero en Orient est une ode au corps et à ses rondeurs. Libéré du diktat de la norme filiforme imposée par le monde de la danse, ce corps se livre sans fard, bousculant le spectateur dans son rapport à l’opulence. La danse n’est plus confisquée par une certaine idée de la performance. La voilà essentiellement poétique, sensuelle, authentique.

L’œuvre du peintre Botero en filigrane, le spectacle convoque aussi Picasso par des éléments de scénographie cubiques qui accompagnent les interprètes. Et le voyage ne s’arrête pas là  : il ouvre les portes de l’Orient jusqu’à la voix de la chanteuse marocaine Fatima Ezzahra Nadifi, et parcourt les mots sublimes de la poétesse et peintre libanaise Etel Adnan (To Be in a Time of War). Des mots troublants, à double tranchant. On les croit évoquer l’addiction aux aliments, alors qu’ils parlent de la guerre et du chaos.

Déroutant, confrontant, Botero rappelle que le temps passe, qu’il fait son office sur le corps des danseurs et de tout un chacun. À quoi bon lutter contre l’inéluctable, pourvu que demeure l’énergie créative. À 43 ans, Taoufiq Izeddiou accepte cette transformation corporelle. Mieux  : il la revendique et la mue en source d’inspiration. « Vivez, dansez » semble-t-on nous souffler, puisqu’il en est encore temps.

— 

Samedi 14.12.2019 (à l’issue de la représentation)
Rencontre constructeurs d’histoires
Taoufiq IZEDDIOU, concepteur et chorégraphe du spectacle

Laissez nous un avis !

Un message, un commentaire ?

Qui êtes-vous ?
    Se connecter
Votre message

Vendredi 13 décembre 2019, par Didier Béclard

La beauté exaltée des corps voluptueux

Dans « Botero en Orient », le chorégraphe Taoufiq Izeddiou s’affranchit des diktats esthétiques liés à l’univers de la danse. Il montre, sans fard mais sans tomber pour autant dans l’exhibition, des corps volumineux qui se font oublier pour ne laisser qu’énergie, poésie et beauté.

Quatre sculptures vivantes debout sur des socles dans un halo de lumière. Les gestes sont lents, parfois imperceptibles. L’une d’entre elles s’agite tandis qu’une autre exhibe fièrement ses bourrelets et sa cellulite. Une batterie de tambours emplit l’espace sonore. Tous se mettent en mouvement et occupent la surface du plateau, comme libérés de la torpeur. Roulades, progressions au sol, solos et unissons, chutes, manipulations des socles qui deviennent scène, tour chancelante ou poids écrasant un corps, dans l’opulence, l’énergie, la maîtrise ou l’abandon, ces « corps volumétriques » s’approprient l’espace avec grâce et élégance.

L’idée de cette pièce a germé dans la tête de Taoufiq Izeddiou, il y a une quinzaine d’années, lorsqu’il découvre à l’aéroport de Venise la sculpture d’un couple de danseurs géants signée par l’artiste colombien Fernando Botero. Impressionné par la masse mais aussi la beauté des personnages, le chorégraphe marocain se souvient de cette image au moment où son corps est en train de se transformer. Et la question du corps qui vieillit dans l’univers de la danse s’impose à lui, tout comme celle des corps qui ne répondent pas aux canons de beauté occidentaux de la danse contemporaine. « ?N’importe quel corps en éveil est capable de produire de la beauté », sera sa réponse.

Spectacle hors norme, servi par des interprètes hors norme, « Botero en Orient » constitue également un plaidoyer contre cette norme imposée, synonyme d’oppression, de stigmatisation, d’humiliation voire de torture. Ainsi, les socles nous ramènent à ceux sur lesquels étaient juchés et photographiés les prisonniers d’Abou Ghraïb (auxquels Fernando Botero a consacré une partie de son œuvre). Loin de faire figure d’exception comme dans la plupart des pièces contemporaines, ici les corps ronds s’imposent, sans partage, et donc sans comparaison possible, comme étant la norme. Le volume s’efface pour laisser toute la place à la force, l’harmonie et la beauté.

Didier Béclard

Théâtre National Wallonie-Bruxelles