Rencontre banale. Elle fait du stop, s’invente des histoires. Il descend vers le sud, sans destination précise. Animés par ce besoin viscéral d’aimer et d’être aimés, ils deviennent inséparables et lèvent, peu à peu, le voile sur leurs petits secrets. Au premier baiser, la passion les embrase. Ils sont libres et peuvent échapper au monde mais ils ont besoin d’argent. Ils perdent bientôt le contrôle de leur propre violence, produit de leur désœuvrement, et sont recherchés par toutes les polices .L’étau se resserre et l’aventure se termine, après un an de cavale. Anti-héros, humains et attachants, Paul et Béatrice se parlent d’amour, se querellent, se réconcilient.
Le décor musical, qui nous plonge dans le monde Gainsbourien, est dû à Nicolas Vandooren, qui, avant même que les lumières s’éteignent dans la salle, nous invite à la « décadanse ». Nous entendons avec plaisir des bribes de chansons connues, dont le Requiem pour un con fredonné par l’acteur, que l’on aurait aimé écouter plus longtemps. Contre toute attente, le grand Serge reste discret, trop pour certains peut-être. Patrick Mincke signe une mise en scène dynamique qui nous entraîne dans le sillage d’un couple d’amants en cavale. Entre le bitume de la route et le voyage vers nulle part, l’esprit du cinéma électrise le plateau. Toujours fuir, s’imaginer ailleurs, ici ou là-bas, il faut courir pour tenir. La route, c’est la vie, disait Kerouac. C’est peut-être aussi l’expression d’un profond mal de vivre. Le décor est réduit à sa plus simple expression Deux chaises ,qui se transforment en sièges de voiture ; un lit, qui devient une palissade dans la scène du meurtre et l’accessoire clé bien sûr ; le revolver. Comme dans tout film du genre, il y a de l’amour, de la bagarre et tutti quanti.
L’humour apparaît pour mieux faire ressortir la tragédie qui menace le couple. On se surprend à suivre en rythme les états d’âme de cette tranche de vie, attentif au jeu tout en nuances d’Alexis Goslain, un jeune acteur décidément bourré de talents. A ses côtés, Delphine Ysaye insuffle son grain de folie mais en fait parfois un peu trop. La force de ce spectacle est incontestablement de passer sans crier gare de la drôlerie à l’émotion. On assiste à des scènes hilarantes : cours de conduite automobile donnés à madame, discours sur la technique de drague, le machisme des hommes……… ; On regrettera cependant l’inégalité des calembours. Si certains bons mots font mouche, d’autres sont plus attendus.
La pièce commence par la fin. Béatrice est seule en prison, séparée de son bébé. Elle repense à son amour passé, qui lui revient comme un boomerang... La technique du flash-back, propre au monde cinématographique, n’est certes pas nouvelle mais efficace. Le spectateur se demande ce qui a pu l’amener là .Le rideau tombe sur la même scène. Béatrice est prostrée sur son lit carcéral, elle en a pour plusieurs années mais elle sait que cet homme, elle l’a aimé et lui ………non plus.
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