Avec "Biographies d’ombres", Lars Norén livre quelques tranches de vie d’une famille au moyen d’épisodes a priori anodins : le fils revient à la maison après une longue absence, le père, fatigué, rentre du travail, la mère se plaint de la chaleur et a prévu de faire des escalopes à la viennoise. On ne saura pas grand chose de l’histoire de cette famille mais on en percevra la tension et on essayera de deviner le drame qui l’habite. La scénographie invite les spectateurs à la spéculation en les installant dans le rôle de ces voisins indiscrets et curieux qui, de leurs fenêtres peuvent observer ce qui se passe à côté de chez eux, sans toutefois disposer de clés suffisantes pour comprendre vraiment.
Impressionniste, la mise en scène d’Isabelle Pousseur est un dévoilement pudique de ce texte dans lequel les non-dits nous en apprennent davantage que les mots prononcés. Avec ce spectacle, c’est à nouveau la question de l’altérité, celle du difficile rapport à l’autre qui est abordée par la directrice de L’Océan Nord. Si la souffrance concerne tout le monde et est à cet égard fédératrice, celle qui est vécue au sein de la famille permet à chacun de se reconnaître dans ces personnages interprétés avec talent par les acteurs. Ceux-ci sont touchants dans leur souffrance tue, ce qui me fait regretter les nombreux cris venus mettre à mal l’émotion créé.
Les trois reprises proposées au théâtre Océan Nord à l’occasion des trente ans de son existence viennent témoigner de la spécificité de ce lieu et des questions qui y sont travaillées. Les spectacles, bien que traitant de thèmes difficiles (la mort, la solitude, la souffrance,...) échappent à la noirceur dépressive de même qu’au pathos. En effet, ceux-ci trouvent toujours un contre point dans l’humour et l’amour qui habitent ces textes et qu’Isabelle Pousseur ne manque pas de révéler. De ces textes sombres, elle cherche toujours à faire ressortir l’espoir et la lumière, aidée dans cette tâche par les très belles scénographies de Michel Boermans.
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