« Si vous ne croyiez pas en la mort, est-ce que vous pourriez supporter la vie que vous avez ? »
Ursule jeune ado et son double quelques années plus tard se partagent la scène. Mélange du présent et du passé ou du présent et du futur, c’est selon. Le spectacle balance constamment entre la réalité (l’est-elle ?) et son pendant imaginé : « Le rêve pascalien : une infinité de vies se succédant à elles-mêmes ». Ursule essaye de mettre de l’ordre dans ses pensées. Il y a « la moi d’avant et la moi d’aujourd’hui ». Ce n’est pas chose aisée, elle est bouleversée. Sa grand-mère est morte. Peut-être pourra-t-elle ressusciter ?
Ursule est enfermée dans une boucle, « putain de boucle ». Comment sortir de là ? Comment accepter de perdre quelqu’un qui était tout ? Les scènes se répètent, différentes, mais semblables. Les émotions prennent le dessus.
Le texte et la mise en scène sont de Chloé Winkel. Chloé Larrère endosse le rôle d’Ursule, enfant, Chloé Winkel celui de son double à l’âge adulte. Impossible d’oublier la grand-mère, de la voir disparaître. Comment peut-on matérialiser la présence d’une personne décédée ? Difficile. En témoigne, cette scène d’anniversaire rejouée encore et encore, dont elle ne peut s’extraire, cette idée de résurrection. Faire son deuil n’est pas évident, et certainement pas pour Ursule. En réalité, Chloé Winkel a perdu sa grand-mère à l’âge de 12 ans, la souffrance fut telle qu’elle est devenue anorexique.
Inspirée par Maeterlinck, Strinberg ou Lacan, Chloé Winkel a donné une ambiance particulière à sa création. Dérives oniriques, vue fantasmée d’une grand-mère tant aimée, présence du père de Chloé sur scène (Ghislain Winkel), sont autant d’éléments qui donnent à ce spectacle son originalité et même une certaine poésie. Les rationnels ne s’y retrouveront pas et parfois, même les rêveurs auront du mal à suivre. L’abondance de références philosophiques crée également une certaine distance. Malgré tout, un spectacle comme on les aime, de ceux qui dégagent quelque chose que d’autres n’ont pas.